Pascal Bauer s'expose au festival NEMO
Pascal
Bauer - Le Cercle (2012)
Plus
qu'une exposition, c'est quasiment une rétrospective qui est
consacrée à Pascal
Bauer dans
le cadre du festival Némo,
le festival arts numériques d'Arcadi.
Présentée par la revue et galerie virtuelle Synesthésie,
cette sélection d'œuvres qui interrogent le corps et l'esprit
est proposée dans l'enceinte du Musée d'art et d'histoire de
Saint-Denis.
Le
Cercle,
pièce maîtresse de cette manifestation, est une nouvelle création
co-produite par Arcadi. Il s'agit d'un dispositif qui évoque, par
certains côtés, les véhicules "reshapés" de Mad Max ;
bien que la référence soit à rechercher dans la mythologie
grecque. Monté sur un chariot qui tourne sans fin sur un axe, un
écran projette à taille réelle l'image d'un taureau. Minotaure
cathodique, la bête, prisonnière de cette trajectoire circulaire,
tente d'échapper à son destin par une course chaotique, mais vaine…
Ses mouvements de fauve en cage commandant le sens de la rotation,
les à-coups et les arrêts de cet étrange attelage qui évolue sur
une bande-son composée de bruits, d'ambiances et de captations
retravaillées…
Deux
autres pièces "encadrent" cette exposition avec également
un écran comme "point médian". D'une part, La
Foule :
on y voit un homme, nu, semblant condamner lui aussi à une marche
sans fin dans un espace clôt… Ce dispositif rappelle, en version
"high-tech", par ses collages d'images, les études sur le
mouvement qu'Étienne-Jules Marey opérait à la fin du XIXème
siècle avec son "fusil photographique". Corps en
mouvement, statique ou supplicié, à ce (grand) jeu, Pascal Bauer ne
pouvait faire l'impasse surL'Élu,
variation vidéographique sur la crucifixion…
Réalisation
"semi-monumentale", Le
Cercle marque
une étape importante dans cheminement artistique de Pascal Bauer qui
s'inscrit de longue date dans son parcours professionnel, en tant que
designer, mais qu'il n'a choisi de révéler que tardivement. Cette
exposition nous permet donc de juger de l'amplitude de son travail au
regard de 4 années de recherches, d'expérimentations, d'audaces, de
provocations. Chaque pièce résulte à la fois d'une lente
maturation, d'une pulsion intuitive (image, sensation, etc.) et d'une
cristallisation lorsque le process, les matériaux et/ou la technique
sont réunis. Autre caractéristique de la démarche de Pascal Bauer,
le désir constant de se renouveler, de ne pas exploiter un filon
pour, au contraire, s'ouvrir à de multiples aventures esthétiques
qui ne sacrifient pas tout au technologique.
D'où
son intérêt majeur pour le corps. Un corps non pas magnifié, mais
brut; même s'il peut être "mis en scène" ou revêtir des
parures qui s'apparente plus à du tuning…
Cette inclinaison pour la problématique du corps dans le champ
artistique, dont chacun sait le caractère presque expiatoire qui a
pu s'exprimer dans les performances de l'actionnisme et du body-art,
prend chez Pascal Bauer encore un autre dimension : plus "soft"
que ces courants vis-à-vis des quels il ne revendique aucune attache
particulière, plus "familière" aussi que ces expériences
ultimes… En témoigne ses Objets
d'Ego dont
on a un aperçu au travers de cette exposition.
A
nos grands hommes -
Pascal Bauer
Une
collection d'artefacts "nés de moments d'énervements", à
la finalité parfois improbable… Ou plutôt dont la finalité n'est
pas à mesurer à l'aune de leur utilitarisme supposé, mais à
considérer pour ce que leur aspect "surréaliste" révèle
de la société : son spectacle, son narcissisme mercantile, ses
non-dits, ses angles morts…Ainsi Á
nos grands hommes (aspirateur
recouvert de fourrure de loup…), dont le point de départ est le
recyclage de l'image du Che par les multinationales du textile, ou Un
moment de détente:
un tabouret en bois muni d'une "excroissance orgueilleuse"
en guise de pied et d'une ceinture pour en éprouver rudesse
prolétarienne par delà l'apparence… Citons aussi L'Odeur
des corps (résine,
soie et cuir). Un parti-pris pas évident, mais intéressant dans la
mesure où, à l'heure du numérique triomphant, l'art privilégie
l'œil (la 3D), le toucher interactivité), l'oreille bien sûr,
mais rarement l'odorat. Et ce n'est pas une faute de goût…
Laurent
DIOUF, pour Digitalarti et Arcadi
Les
machines kafkaïennes de Pascal Bauer
Au
musée d’art et d’histoire le plasticien est invité par
Synesthésie à exposer au musée ses installations vidéo-robotiques,
objets et photographies dans le cadre du Festival des arts numériques
Nemo. Du 7 décembre au 28 janvier.
Au
fond du cloître, côté est, une curieuse machine blanche aux roues
volumineuses tourne en suivant un large cercle. Elle présente aux
spectateurs un large écran sur lequel se succèdent des images
stylisées d’un taureau semblant évoluer selon une logique précise
quoique peu évidente, à la fois libre et contraint par les
dimensions de l’écran.
«
Le taureau est un animal emblématique qui symbolise à la fois la
puissance et l’asservissement », explique Pascal Bauer, le
concepteur de la machine. Invité par Synesthésie dans le cadre du
festival des arts numériques Nemo à exposer au musée d’art et
d’histoire, ce plasticien passé par le design travaille beaucoup
sur la notion d’aliénation.
«
Depuis l’âge de 14 ans, je suis marqué par Kafka. J’ai avec cet
auteur majeur une proximité d’esprit. En fait, je pars du constat
suivant : notre appartenance à une société nous permet de vivre,
mais dans le même temps nous enferme. Ici, la machine est le symbole
de cette contrainte sociale. »
Pascal
Bauer présente au musée de nombreuses autres pièces qui offrent,
selon lui, un panorama fidèle de son travail de ces quatre ou cinq
dernières années. Comme cet homme qui évolue (toujours au sein
d’un écran) sur une ligne droite. Il va et vient, se déplace mais
ne peut dépasser les limites imposées, l’espace fermé (La
Foule).
«
Ce que je trouve intéressant dans ce que fait Pascal Bauer, c’est
qu’il met en lien la vulnérabilité de l’humain et la machine
qui le modifie. Et son travail est très spectaculaire, il peut
s’apprécier selon différents niveaux de lecture », dit
Anne-Marie Morice, la directrice de Synesthésie.
Outre
le cloître, Pascal Bauer investit d’autres lieux du musée. Dans
la chapelle, il présente L’Élu,
une autre vidéo sur laquelle un crucifié sans bras se débat dans
un équilibre précaire. Là encore, c’est la fragilité et le
danger qui émanent. La salle du chapitre accueille plusieurs
installations, ses Objets
d’ego(s),
souvent nés d’instants vécus ou perçus.
Pousser la contradiction
«
Par exemple, pour À
nos grands hommes,
je suis parti du T-shirt orné du visage du Che. Ce que le
mercantilisme a fait de cet homme m’énerve profondément ! »,
s’écrie-t-il. Un vieil aspirateur recouvert de fourrure est
prolongé par son tube, qui devient ici fusil, fièrement brandi par
une sorte de Buffalo Bill du pauvre vêtu du fameux T-shirt. Le
ridicule tue-t-il ? « J’ai voulu pousser la contradiction jusqu’au
bout de sa logique. »
Chez
Pascal Bauer, l’humour n’est jamais loin. « Il permet de parler
de manière légère de choses denses et profondes. » L’humour et
l’étrangeté. Avec Ne
jamais laisser vos enfants seuls ou Icône,
il joue avec l’image et la matière, détourne les unes, tord les
autres, fouille les antagonismes violence/douceur,
immobilité/mouvement.
«
Je travaille beaucoup sur la notion de contradiction et sur la
récupération bourgeoise des choses qui les vide de leur sens
premier », lance-t-il. Présenter ses œuvres au musée d’art et
d’histoire était un défi. Synesthésie l’a relevé. « Faire se
rencontrer ce lieu magnifique, ô combien patrimonial, avec quelque
chose de très contemporain, voire futuriste, nous a semblé, au
musée et à nous, particulièrement intéressant », répond
Anne-Marie Morice. Mais plus qu’à un choc des cultures, Pascal
Bauer nous entraîne vers une vision révoltée d’un monde
aseptisé, dénaturé. Une vision finalement intemporelle.
Benoît
Lagarrigue pour JSD
Photos, vidéos, objets : l'expo étonnante de Pascal Bauer
«
Le cercle, la foule, l'élu et les objets d'ego(s). » C'est
l'intitulé étrange de l'exposition qui présente quatre années de
travail de Pascal Bauer, au musée d'Art et d'Histoire de
Saint-Denis. A travers des installations vidéo-robotiques, des
objets, des photographies, des sons, l'artiste s'empare de sujets
graves. Il explore les facettes de l'aliénation et de la part de la
douce folie égocentrique qu'il nous faut assumer pour vivre.
Ses
portraits et autoportraits expriment la dépossession, la perte
d'autonomie. Le corps est exposé dans sa fragilité, encastré dans
une mécanique complexe à laquelle il se plie. Les œuvres sont
ludiques au premier abord, puis plus profondes. Les images, fixes ou
en mouvement, frappent l'esprit des spectateurs. Parmi la quinzaine
de pièces présentées, le Cercle (notre photo) est un dispositif
impressionnant qui met l'écran en mouvement sur lequel un taureau
semble réagir de façon imprévisible à la présence du
public.
Jusqu'au 28 janvier au musée d'Art et d'Histoire, 20 bis, rue Gabriel-Péri. Samedi et dimanche de 14 heures à 18h30, lundi, mercredi, vendredi de 10 heures à 17h30, jeudi de 10 heures à 20 heures. Tarif unique : 1 €. Gratuit ce dimanche comme le premier dimanche de chaque mois.
Jusqu'au 28 janvier au musée d'Art et d'Histoire, 20 bis, rue Gabriel-Péri. Samedi et dimanche de 14 heures à 18h30, lundi, mercredi, vendredi de 10 heures à 17h30, jeudi de 10 heures à 20 heures. Tarif unique : 1 €. Gratuit ce dimanche comme le premier dimanche de chaque mois.
Le
Parisien